Mémoire dans le cadre des auditions publiques sur le Projet de loi n° 111 (Loi modernisant la Loi sur les coopératives et modifiant d’autres dispositions)
12 novembre 2025
Dans le cadre des auditions publiques sur le Projet de loi n° 111 (Loi modernisant la Loi sur les coopératives et modifiant d’autres dispositions), voici les recommandations et propositions d’amendements du Réseau de coopération des EÉSAD qui ont été transmises à la Commission parlementaire :
1. Une reconnaissance accrue de la distinction coopérative des entreprises collectives
Pour contribuer à une meilleure reconnaissance et compréhension de l’entreprise coopérative, il est proposé d’enrichir la définition de coopérative prévue à l’article 3 de la Loi sur les coopératives (ci-après « L.C. »), par l’ajout des principes de l’économie sociale énoncés à la Loi sur l’économie sociale. Cette référence aux principes de l’économie sociale dans la Loi sur les coopératives rejoint d’ailleurs la volonté exprimée dans le Plan d’action gouvernemental en économie sociale (PAGES) de promouvoir et de soutenir les entreprises d’économie sociale.
2. La promotion de la coopération entre la coopérative et la collectivité qu’elle vise
À la suite de l’introduction de la coopérative d’intérêt collectif à l’article 3 L.C. par l’article 2 (2°) du PL111 que nous saluons, nous proposons de modifier certains articles de la Loi sur les coopératives, afin d’inclure la promotion de la coopération entre la coopérative et la collectivité qu’elle vise, le cas échéant. Nous suggérons également d’introduire dans la Loi sur les coopératives, l’obligation pour la coopérative d’informer la collectivité qu’elle vise de la nature et des avantages de la coopération.
3. La cohérence avec la Loi sur l’économie sociale – développement durable et socioéconomique
L’article 3 paragraphe 3 du PL111 modifie le paragraphe 8 de l’article 4 L.C., en précisant que le soutien au développement durable du milieu est une règle d’action coopérative. Nous suggérons d’ajouter le terme « socioéconomique », afin d’être en cohérence avec la Loi sur l’économie sociale qui a notamment pour objet de reconnaître la contribution particulière de l’économie sociale au développement socioéconomique du Québec.
4. Coopérative exploitée dans l’intérêt de la collectivité
Dans un souci de cohérence avec l’article 2 paragraphe 2 du PL111, il conviendrait de modifier l’article 4 paragraphe 1 du PL111, afin de confirmer et clarifier qu’une coopérative ne peut pas être exploitée uniquement dans l’intérêt d’une collectivité, et ainsi lever toute ambiguïté à cet égard.
5. Utilisation du mot « coopération » dans le nom pour indiquer le caractère coopératif
Bien que certaines entreprises qui ne sont pas des coopératives aient utilisé le terme « coopération » dans leur dénomination sociale, et ce, malgré le fait qu’elles contreviennent à l’article 16 de la L.C., plusieurs coopératives utilisent actuellement ce terme en conformité avec cette disposition, et dans le respect de leur forme juridique. Nous ne croyons pas qu’il faille empêcher une coopérative d’utiliser ce terme dans son nom, afin d’être conforme à l’article 16 proposé par l’article 7 du PL111. La clause de droits acquis (« grand-père ») est certes saluée, mais un simple retrait de l’exclusivité de ce mot aux coopératives suffirait et serait plus équitable selon nous.
6. Règlement des différends
Nous accueillons favorablement la modification de l’article 54.1 L.C. par l’article 20 du PL111, qui contribuera à renforcer la valeur de la coopération dans le règlement des différends entre les parties, une valeur chère aux coopératives. Cependant, il serait souhaitable de laisser une plus grande latitude aux parties dans le choix du mode privé de règlement des différends, car la médiation ne constitue pas toujours le mode le plus approprié selon les circonstances. Parmi les principes fondamentaux encadrant les modes privés de prévention et de règlement des différends, tels qu’énoncés aux articles 1 et 2 du Code de procédure civile, figurent la liberté des parties de choisir d’un commun accord le mode qui leur convient et leur engagement volontaire dans le processus. Nous proposons d’utiliser l’expression « mode privé de prévention et de règlement des différends » telle qu’énoncée dans le Code de procédure civile, qui inclut la médiation, et ce, afin d’assurer une cohérence terminologique et juridique.
7. Défaut de convoquer l’assemblée annuelle
Une précision pourrait être apportée au nouvel alinéa 2 de l’article 76 L.C. proposé par le paragraphe 2 de l’article 26 du PL111, afin de limiter le remboursement aux frais utiles et raisonnables et ainsi éviter les abus ou les réclamations excessives.
8. Présomption d’acceptation par un administrateur absent
Nous proposons de ne pas retenir cette modification à l’article 98 L.C. et de laisser l’article dans sa mouture actuelle, qui est d’ailleurs similaire à celle de l’article 337 du Code civil du Québec. Le statu quo permettra de respecter le caractère bénévole de la charge d’administrateur et n’imposera pas un fardeau additionnel indu à ces personnes.
9. Liquidation simplifiée des coopératives
Le plafond de l’actif permettant aux coopératives de procéder à la liquidation simplifiée n’a pas bougé depuis 2003. Considérant que le plafond était passé de 10 000 $ à 25 000 $ en l’espace de 8 ans, nous croyons que de faire passer le plafond prévu au premier alinéa de l’article 185.2 L.C. à 50 000 $ serait tout à fait acceptable dans les circonstances et dispenserait les coopératives qui ont un actif maximal de 50 000 $ de l’obligation de nommer un liquidateur.
10. Composition du conseil d’administration
Parfois, des groupes de membres ne sont pas présents aux assemblées annuelles. Ceci fait en sorte que, si un poste au conseil d’administration, pour lequel aucun autre groupe n’a un droit de vote est en élection, il y restera un siège non comblé. Cela peut alors contribuer à l’impossibilité d’atteindre le quorum au conseil d’administration. Nous proposons l’ajout d’un quatrième alinéa à l’article 83 de la L.C. pour permettre à l’assemblée des membres d’élire l’administrateur du groupe visé.
11. Obligation de conserver les rapports annuels dans le registre
L’article 124 de la L.C. proposé par l’article 44 (2°) du PL111 oblige la coopérative de tenir un registre contenant « ses rapports annuels ». Considérant que le non-respect de cette obligation est sanctionné à l’article 246 L.C., nous croyons qu’une coopérative ne devrait être sanctionnée que pour les rapports manquants produits après l’entrée en vigueur du projet de loi. Nous proposons donc l’ajout d’un alinéa à l’article 246 L.C. proposé par l’article 132 du PL111.
12. Contributions des membres
Nous croyons que le législateur pourrait clarifier que, malgré le fait qu’on parle d’une contribution, celle-ci peut varier selon le membre. Par exemple, la contribution pourrait varier en fonction du chiffre d’affaires d’une entreprise membre et/ou en fonction de la catégorie de membre à laquelle un membre appartient.
13. Nomination d’un auditeur
Dans la pratique, les mandats des auditeurs sont donnés pour plusieurs années. La nomination prévue à l’article 135 de la L.C. s’avère donc illusoire dans bien des cas. Étant donné que, conformément à l’article 136.1 alinéa 1 L.C., il est possible de révoquer l’auditeur, nous proposons une modification de l’article 135 L.C. qui reflète la pratique.
14. Augmentation des plafonds pour la mission d’examen et la liquidation simplifiée
Depuis 2005, le plafond des produits de la coopérative lui permettant d’avoir recours pour la préparation de ses états financiers à une personne qui n’est pas membre de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec est resté à 249 999 $, soit moins de 250 000 $. Or, depuis ce temps, cette disposition s’applique à un nombre beaucoup plus restreint de coopératives en raison de l’inflation. Nous suggérons de doubler le plafond prévu à l’article 4 du Règlement d’application de la L.C. pour le porter à 499 999 $, soit moins de 500 000 $.
15. Pourcentage d’affaires avec les membres
Le pourcentage d’affaires avec les membres prévu à l’article 16 du Règlement d’application de la Loi sur les coopératives, soit 50%, devrait être réduit pour être conséquent avec la reconnaissance de la nature d’intérêt collectif d’une coopérative. Une coopérative devrait pouvoir desservir la collectivité qu’elle vise sans égard au statut de membre ou non des personnes qui la constituent.